À l’École polytechnique de Cracovie ont été élaborés des composés chimiques aux propriétés exceptionnelles de réaction à la lumière, ce qui permet des applications révolutionnaires dans l’industrie automobile, la polygraphie et l’aviation, ainsi que dans le domaine de la biologie moléculaire.
« Les capteurs chimiques moléculaires, ce sont des composés entièrement nouveaux des métaux de terres rares. Ils ont été élaborés pour surveiller les processus de photopolymérisation et les modifications de la cinétique des couches polymères », explique la professeure Joanna Ortyl du Laboratoire de photochimie et de spectroscopie optique de l’École polytechnique de Cracovie.
L’invention mise au point par Joanna Ortyl trouve son application dans l’industrie automobile, l’industrie du meuble et de l’imprimerie, dans la fabrication d’emballages pour le secteur alimentaire, et dans tous les domaines où les matériaux sont soumis au photo-durcissement. Ces capteurs moléculaires organo-inorganiques luminescents permettent de mesurer les propriétés des vernis, des adhésifs, des peintures et d’autres substances qui durcissent lors de l’exposition à la lumière, sans aucune intervention mécanique dans le matériau. De plus, le mesurage peut être effectué au moment du durcissement, c’est-à-dire en ligne et in situ. La méthode de Joanna Ortyl permet par exemple de mesurer l’épaisseur du revêtement de peinture appliqué sur la carrosserie d’une voiture et de déterminer son temps de séchage.
Les composés lumineux des métaux de terres rares
Joanna Ortyl a élaboré les capteurs à partir de composés d’europium, de terbium et de samarium, dont les analogues sont utilisés par exemple dans la fabrication des diodes, sources lumineuses de type LED. « Les capteurs chimiques ainsi élaborés sont luminescents dans le cadre du spectre visible. Selon le type utilisé, il est possible d’obtenir un capteur rouge, orange ou vert, jusqu’à la gamme infrarouge NIR », explique Joanna Ortyl.
Les capteurs moléculaires sont des composés chimiques sous forme de poudres incolores ou, éventuellement, de liquide incolore. Il suffit d’en ajouter une trace au composite durci, pour qu’ils puissent donner des informations sur l’évolution des réactions chimiques dans le matériau. Au cours de la photopolymérisation, ils absorbent la lumière et émettent un rayonnement électromagnétique d’une couleur donnée qui, à son tour, contient des informations sur les processus intervenant dans le matériau. Les capteurs chimiques n’affectent pas les propriétés des composites polymères et des revêtements polymères en cours. L’invention de Joanna Ortyl a été brevetée.
Pour élaborer ces nouveaux composés, la chercheuse a utilisé la méthode FPT (Fluorescence Probe Technology), mise au point au Laboratoire de photochimie de l’École polytechnique de Cracovie. « Cette méthode d’observation de la photopolymérisation permet d’optimaliser ses paramètres et de contrôler les produits », précise-t-elle.
Les capteurs de pression et de température
En collaboration avec son équipe de recherche, Joanna Ortyl poursuit ses études sur l’utilisation des capteurs à partir de métaux de terres rares. Elle teste les capteurs qui pourraient être utilisés pour mesurer les changements de pression. Ces capteurs devraient être moins chers que les composés à base de la platine qu’on utilise actuellement et qui sont relativement trop coûteux. Les capteurs de pression mis au point par l’équipe de Joanna Ortyl sont sensibles aux changements de pression, et pas seulement aux fluctuations du taux d’oxygène, comme c’est le cas des capteurs de pression actuels. Grâce à leurs propriétés uniques, les nouveaux capteurs de pression seront capables de mesurer les changements causés non seulement par la pression de l’air, mais également par les liquides (par exemple la pression de l’eau sur la surface d’un bateau en immersion), ou bien encore par la pression d’éléments solides sur la surface en question. Joanna Ortyl travaille aussi sur les capteurs de température qui sont appliqués sous forme de revêtement polymère.
Des photosensibilisateurs qui méritent une médaille
Joanna Ortyl mène aussi des recherches sur la photopolymérisation. En 2018, l’invention de son équipe, « New Photoinitiating Systems for Processes of Cationic, Free-radical and Hybrid Photopolymerization under UV and Visible Light », lui a valu la médaille d’or décernée au Festival international des inventions de Silicon Valley (SVIIF), aux États-Unis. Il s’agit de nouveaux photosensibilisateurs qui absorbent l’énergie du rayonnement lumineux et qui la transfèrent aux substances participant aux réactions photochimiques, ce qui accélère le durcissement du revêtement.
l’École polytechnique T. Kościuszko de Cracovie
Faculté d’ingénierie et de technologie chimique
Institut de chimie et de technologie organique
Laboratoire de photochimie et spectroscopie optique